Comment décririez-vous les particularités de votre territoire ?
La Communauté de communes des Collines du Perche, ce sont 12 communes et 6 500 habitants soit un territoire marqué par une faible densité de population mais où tout le monde s’exprime. Nous avons bénéficié d’une adaptation de la loi NOTRe pour éviter d’avoir un territoire trop étendu. Mon poste de co-présidente de la commission communes et territoires ruraux de l’AMF me permet d’avoir une vision nationale du territoire et de la ruralité et nous voyons bien aujourd’hui que les grandes agglomérations rurales ne fonctionnent pas car il y a des communes qui ne se sentent pas interpellées ou même responsables de décision.
Quel est ou quels sont les principaux axes de votre politique culturelle ?
Nous sommes situés dans le nord du Loir-et-Cher et à l’entrée sud du Perche. Notre travail, avec mes collègues, depuis plusieurs années a été de faire inscrire cette partie du département dans le Parc naturel du Perche. Ce sera chose faite en 2025. C’est une dimension culturelle que nous portons vraiment dans le cadre de la biodiversité et de l’attention à la nature. Nous avons, par ailleurs, sur le territoire une maison botanique qui est remarquable. Nous inscrivons vraiment cette structure dans notre dimension culturelle parce qu’elle favorise une identité culturelle du territoire très forte à la fois autour du cheval percheron et du bocage. Un autre élément fort de notre territoire est la création, il y a 20 ans maintenant, d’une agence rurale de développement culturel, L’Echalier, qui a notamment permis la réhabilitation d’une grange et la création d’un vrai théâtre en son sein.
Quels sont vos principaux atouts culturels : tissu associatif, patrimoine, équipement… ?
Notre territoire, c’est vrai, est repéré pour sa dimension culturelle parce que nous avons, aux côtés de L’Echalier, une médiathèque et un patrimoine très important avec, notamment une commanderie de Templiers que nous sommes en train de restaurer et qui a été sélectionnée au loto du Patrimoine.Ces trois structures, qui sont – à l’exception de la médiathèque – associatives pour l’instant, se sont mises en consortium depuis trois ans pour créer un tiers lieu financé par l’Agence nationale de la cohésion des territoires. Il est notre office du tourisme et valorise également tout le travail culturel sur notre territoire. L’Echalier y a, par exemple, créé une librairie associative.
Quels sont vos principaux freins : compétences, équipements, ingénierie… ?
Le premier frein que je pourrais mentionner est la difficulté, parfois, de faire en sorte que le développement de la Culture soit pensé avec autant d’utilité que la maison France Services par exemple. Un autre frein est, bien-sûr, le fait que nous soyons juste en financement car cela peut nous bloquer si l’on souhaite étendre et développer notre politique. Pour autant, nous finançons correctement ces services actuellement et nous les accompagnons également pour trouver d’autres sources de financement. Je ne veux pas être de ceux qui disent que la Culture n’a jamais assez d’argent car je pense qu’on peut se donner les moyens à notre mesure. J’espère donner envie à d’autres élus de s’autoriser à développer un projet culturel parce que si l’Etat, le Département et la Région nous aident, c’est qu’ils sentent que le territoire est investi dans ce champ. Le fait que la Culture soit une compétence partagée rend possible le développement des projets même pour les petits territoires.
Qu’apporte la présence des arts et de la culture dans votre territoire : animation, rayonnement, fierté, partage… ?
De manière générale, cette vie culturelle permet de retenir des populations urbaines qui découvrent l’offre du territoire et d’un point de vue économique, cela crée de l’emploi. Par ailleurs, il faut noter que l’accueil d’artistes en résidence permet également de faire vivre le territoire. Dès 2004, nous avons accueilli Le Cheptel Aleïkoum, une compagnie de cirque, à Saint-Agil. Cet accueil est durable puisqu’ils sont toujours installés dans la commune devenue Couëtron-au-Perche. Cela signifie qu’ils ont non seulement créé des emplois mais qu’ils ont acheté des maisons et que leurs enfants remplissent nos écoles. Cela a prouvé que l’inscription d’une vie culturelle ce n’est pas simplement pour faire plaisir aux intellectuels, à l’esprit de découverte de certains mais cela a aussi des retombées concrètes.
FOCUS SUR UNE INITIATIVE
L’Echalier, agence rurale de développement culturel
Présentation du dispositif
L’Echalier, agence rurale de développement culturel, a été créée en janvier 2000 pour favoriser l’accès de chacun à des équipements culturels sur le territoire. Le nom choisi désigne un outil qui, dans le bocage, permet de regarder plus loin. Ce dispositif a pour mission de programmer des spectacles professionnels, de diffuser des films, d’organiser des expositions, d’ouvrir des résidences d’artistes mais aussi d’organiser des actions de lecture publique et des ateliers théâtre. Depuis 2002, l’agence s’est vue confier par la Communauté de communes des Collines du Perche, la grange de Saint-Agil aujourd’hui transformée en véritable théâtre et lieu de création artistique et culturelle.
L’Echalier, atelier de fabrique artistique
Lors de la réhabilitation de la Grange de Saint-Agil, un atelier technique s’est adossé à la création du théâtre. Cela a permis de développer un projet reconnu aujourd’hui comme Atelier de Fabrique Artistique. Il s’agit de l’accueil de résidences d’artistes qui sont dotées. Les artistes sont reçus minimum 15 jours et sont complétement libres de leurs horaires puisqu’on leur donne les clés du théâtre avec une seule contrainte : un jour de repos dans la semaine.
L’Echalier et la lecture publique
L’Echalier fait également beaucoup avec la médiathèque sur la lecture publique en organisant des ateliers d’écriture dans les écoles avec des auteurs et des illustrateurs. Le fruit de ce travail est présenté tous les ans au printemps lors du Salon des Bonimenteurs. La Communauté de communes, qui a la compétence scolaire, favorise ces actions.
Une seule convention pour un financement partagé
L’Echalier est financé autour d’une seule convention signée par toutes les parties de la petite commune à l’Etat en passant par l’EPCI, le Département et la Région. Karine Gloanec Maurin explique à ce propos : Nous sommes tous autour du même texte alors qu’en général cela se fait en bilatérale. C’est un modèle que je revendique et qui fonctionne depuis presque 15 ans. Chacun finance à hauteur de ce qu’il peut, donc il y a un delta très fort entre les financements. Mes collègues élus les moins convaincus ont évoqué l’idée de stopper nos financements quand il y a eu les aides de l’Etat et de la Région. Il n’en était pas question car nous en sommes les premiers bénéficiaires et même si c’est peu, la subsidiarité existe et nous participons à notre mesure. C’est notre fierté de dire que nous sommes partenaires.
La fonction d’élu pour Karine Gloanec-Maurin.
Même si la Culture est mon métier, je ne suis jamais entrée dans le conseil d’administration de l’Echalier. Je leur ai laissé une totale liberté. J’ai fait mon travail d’élu, avec le soutien de mes collègues : nous avons cherché des financements, nous avons voulu investir pour qu’il y ait un lieu adapté avec des équipements mais nous n’avons jamais pesé dans les choix de la programmation et du fonctionnement. C’est une fierté et c’est important de le dire. Les élus ne sont pas là pour faire une programmation. Notre rôle est de soutenir avec les outils qui sont les nôtres et non pas avec ceux du métier culture. Il ne faut pas confondre le métier culture et la fonction d’élu, ce n’est pas la même chose.
Propos recueillis par Noémie Picard