Alors que le Gouvernement s’est fortement engagé, aux côtés des collectivités, dans l’ambition du “100% EAC”, pour que tous les enfants scolarisés de la maternelle au lycée soient concernés par une action d’éducation artistique et culturelle, le Département des études, des statistiques et de la prospective (DEPS) du ministère de la Culture a produit une étude au titre optimiste : « Trois élèves sur quatre touchés par au moins une action ou un projet relevant de l’éducation artistique et culturelle« . Des chiffres rares concernant l’année scolaire 2017-2018 et portant sur un échantillon de 600 écoles et collèges qui, pour encourageant qu’ils soient, permettent surtout d’identifier là où un effort particulier reste à faire. Quelques données et commentaires.
L’étude du DEPS s’attache au nombre d’enfants “touchés” par l’EAC, dans les écoles et les collèges distingués selon qu’ils sont “défavorisés” ou non, en quartier d’éducation prioritaire ou non, isolés ou non, ruraux ou urbains, dotés de référents EAC ou non… Il y est également question des types d’activités mobilisés.
Combien d’enfants sont-ils touchés ? Lors de l’année scolaire 2017-2018, sur 10 millions d’élèves, 7,6 millions d’entre eux ont été touchés par au moins une action ou un projet relevant de l’éducation artistique et culturelle, soit trois élèves sur quatre. La proportion s’élève à 82% dans le premier degré et à 62% dans les collèges.
Autre enseignement : au-delà de l’EAC proprement dite mais en lien étroit avec elle, la quasi-intégralité des écoles et des collèges organisent au moins une activité culturelle (sortie culturelle, rencontre avec un artiste, etc.). Et dans trois écoles sur quatre et dans plus de neuf collèges sur dix, au moins une activité est réalisée en partenariat avec une structure culturelle.
Où sont-ils davantage touchés ? Cette significative avancée de la sensibilisation aux arts et à la culture à l’école ne se déploie évidemment pas de manière homogène. Plusieurs facteurs entraînent des disparités, sachant que, globalement, les écoles sont plus actives de ce point de vue que les collèges (78% contre 55%) et que la moyenne des actions d’EAC dans le primaire se situe à 3,4 actions pour seulement 1,8 chez les collégiens. Mais d’autres différences s’imposent à l’intérieur de ces deux types d’établissements scolaires :
- 77% des écoles proposent des actions d’EAC à l’ensemble des élèves et 16% seulement à la moitié d’entre eux ; au collège, plus de 50% des établissements s’adressent à l’intégralité des enfants et un peu moins à la moitié d’entre eux.
- Ce sont les élèves des petites écoles (moins de 80 élèves) qui bénéficient du plus d’actions d’EAC (83% contre 72%). De plus, « pour ces écoles de petite taille, le nombre de projets rapporté à 100 élèves atteint 5,4 (contre 2,6 pour les écoles de plus de 160 élèves) ». D’où ce constat, corrélé : « Les écoles rurales, en moyenne plus petites, touchent, par leurs actions et projets EAC, davantage d’élèves que les écoles en milieu urbain. » Des disparités similaires sont constatées pour les collèges entre ceux de moins de 500 élèves et les autres.
- Autres facteurs de différence, le lien entre le nombre d’élèves touchés et l’ancienneté des enseignants : il y a environ 15% de plus d’élèves (70% contre 56%) là où les professeurs ont davantage d’expérience. Un constat qui peut être mis en relation avec cet autre : les collèges « les plus marqués socialement » sont moins concernés par l’EAC que les autres (environ 50% contre 70%).
L’étude note enfin aussi des disparités liées à la structuration de l’EAC : dans les collèges ayant inscrit un “volet EAC” dans leur projet d’établissement, 92% des élèves participent à au moins une action ou un projet EAC, contre 75% quand ce n’est pas le cas.
Ces différences peuvent sans doute indiquer quelques priorités pour l’avenir : veiller plus particulièrement aux grands établissements, notamment en quartier d’éducation prioritaire, généraliser l’inscription de l’EAC dans les projets d’établissement et désigner des référents EAC. Sur ce dernier point en effet, et sachant que seulement deux écoles sur cinq et deux collèges sur trois disposent d’un coordinateur de l’EAC, l’étude note que 75% des collèges les plus concernés ont un référent EAC (soit 1,4 fois plus que pour les autres).
Comment sont-ils touchés ? Près de 100% des écoles et des collèges organisent au moins une activité en lien avec l’éducation artistique et culturelle par an (tableau ci-dessus). Ce sont d’abord des sorties et visites culturelles (dans 92% des écoles et 99% des collèges), puis les voyages à dimension culturelle ou les rencontres avec des professionnels et des artistes (7 collèges sur 10, 1 école sur 2).
Le tableau complet de ces activités complémentaires à l’EAC fournit par ailleurs une indication notable : dans le triptyque « officiel » de l’EAC – connaissances, rencontres (avec les œuvres et les artistes) et pratique artistique –, le dernier de ces trois “piliers de l’EAC” reste le moins développé.
Les partenariats. Toutes actions et projets de sensibilisation aux arts et à la culture confondus, les partenariats avec des structures culturelles se sont généralisés puisqu’ils concernent trois écoles sur quatre et neuf collèges sur dix. Classements des principaux partenaires : les musées et lieux d’exposition (35% des écoles et 50% des collèges), les bibliothèques (34% et 42%), les compagnies de théâtre et de danse (27% et 51%), les artistes et collectifs d’artistes (26% et 51%), les cinémas (25% et 39%), enfin les salles de spectacle (24% et 47%).
Là encore, l’étude montre que l’importance de ces partenariats est lié d’une part à l’ancienneté des enseignants et, d’autre part, à la présence d’un référent ou coordinateur EAC (+11 points dans les écoles et +13 points dans les collèges).
Qu’est qu’une “activité” ou un projet” d’EAC ? L’unité de mesure des chiffres du DEPS est « une action ou un projet relevant de l’éducation artistique et culturelle », envisagé sur un an. Or entre une sortie culturelle à une classe ou plusieurs, tel jour, et un atelier hebdomadaire pour un petit groupe d’élèves, la différence est grande. Des données plus précises, par élève, par heure, n’apporteraient-elles pas des éclairages différents sur l’avancée de l’ambition de généralisation de l’EAC ?
Les cinq « classes orchestre » d’Allonnes
La Ville d’Allonnes (Sarthe) s’est engagée depuis 2005 dans une politique volontariste de création de “Classes Orchestre”, déployées sur 2 ou 3 ans, ainsi que dans un partenariat avec l’orchestre symphonique Divertimento. Le choix s’est d’abord porté sur des collèges, avec deux établissements.
A partir de 2015, des écoles ont bénéficié à leur tour du dispositif : une classe orchestre à cordes de 2015 à 2018 puis, pour la période 2018-2020, une classe orchestre d’harmonie ainsi qu’une autre classe orchestre à cordes. La création d’un troisième dispositif, qui concernera 24 élèves de CE1, a été engagée pour 2019-2020.
Ces dispositifs sont subventionnés via les projets “Politique de la ville” et “Cités éducatives” (label regroupant des initiatives engagées par des collectivités, l’Etat et des associations dans des quartiers prioritaires) en partenariat avec la DRAC et le conseil départemental de la Sarthe.