Située au sud du département de l’Essonne (91), en Ile-de-France, la commune de Lardy – plus de 5 500 habitants – fait partie de la Communauté de communes Entre Juine et Renarde au sein de laquelle elle joue, aux côtés de la ville d’Etréchy, un rôle de ville-centre. Réélue pour un deuxième mandat en charge des affaires culturelles, du jumelage et de la communication, Méridaline Du Pasquier développe les axes d’une politique culturelle qui se donne pour mission de favoriser le lien social. Avec, en perspective, la mise en œuvre d’une politique culturelle participative. Entretien avec Méridaline Du Pasquier, maire-adjointe aux affaires culturelles et Annie Dognon, maire-adjointe aux affaires scolaires.
La nouvelle équipe municipale de Lardy s’inscrit-elle dans la continuité de la précédente ?
L’équipe municipale a été réélue avec la même équipe d’adjoints. Donc une grande continuité. Pour autant, des questions se posent, car nous sentons un tournant dans les comportements culturels. Si les publics sont finalement présents aux spectacles, la décision de venir se fait de plus en plus au dernier moment… On va donc démarrer ce mandat par un audit et ce qu’on appelle une “formation-action” afin de mieux appréhender notre relation avec les publics, dans le sens d’une approche plus participative, plus attentive aux attentes des habitants.
Pour revenir un peu en arrière, quand nous sommes arrivés en responsabilité, notre politique a été d’ouvrir au maximum les programmations pour toucher le plus largement possible – tout en maintenant la qualité –, essentiellement vers les familles. D’où une offre multifacette, éclectique : danse, musique, théâtre, marionnettes… Aujourd’hui, l’objectif est atteint. Mais ce sont un peu toujours les mêmes et nous aimerions maintenant arriver à intéresser des gens que nous ne touchions jamais jusqu’alors.
La particularité de votre territoire ? La proximité avec Paris est-elle pesante, bénéfique ?
Nous sommes assez loin de Paris, en territoire pour ainsi dire semi-rural. Les gens y vont pour travailler, mais peu pour aller au spectacle. D’autant plus qu’ici, en sud-Essonne, l’offre est réelle, notamment avec l’Agora d’Evry, le théâtre de Massy, ceux de Longjumeau et de Brétigny, etc. Pour cette raison, notre politique se construit beaucoup autour de partenariats locaux. Comme par exemple pour le festival d’arts de la rue “De jour/De nuit” ou encore pour le spectacle annuel “Les Hivernales”, festival itinérant en Essonne proposé par la compagnie “Atelier de l’orage”. Je suis vraiment attachée à l’idée d’élaborer avec les acteurs locaux une offre de qualité.
D’un point de vue démographique ?
L’une des particularités de la ville est de s’étendre sur 7 km le long de la voie ferrée avec deux gares de chaque côté d’un technocentre Renault qui la coupe en deux. D’un côté, se trouve le bourg, très ancien et de l’autre côté le quartier dit du « Pâté » composé essentiellement de deux lotissements, l’un qui date d’après la guerre 39/45, l’autre des années 1990. Et puis en limite de la commune de Bouray, le long de la Juine, s’étend également le quartier de Cochet qui s’est urbanisé à partir de 1945.
Comment se font les choix culturels ?
Les projets culturels, surtout basés sur des partenariats, se construisent forcément très en amont, quasiment un an à l’avance. Avec pour conséquence que, quand on s’adresse aux élus de la commission culturelle, tout peut leur sembler déjà bouclé. J’ai donc été un peu frustrée de ne pas construire des échanges plus actifs et prospectifs. Et j’espère aussi que la démarche d’audit que nous allons mener avec un cabinet de consultants va pouvoir donner un peu plus d’horizon à nos échanges.
Les lignes de force de votre projet culturel ? La notion de droits culturels vous inspire-t-elle ?
Principales lignes de force, la pluridisciplinarité des offres artistiques et les partenariats, déjà évoqués. Notre objectif global est de proposer au moins une prestation culturelle une fois par mois, de septembre à juin. A quoi il faut ajouter des actions en direction des scolaires.
Quant aux droits culturels, cela correspond à notre point de réflexion actuelle, mais j’avoue que cette notion reste encore pour moi un peu floue… Nous y travaillons. Aujourd’hui nous allons installer une commission extra-municipale, ouverte aussi bien aux élu.e.s qu’aux habitants.
Cela étant, on s’oriente déjà sur la voie de la participation. Nous avons par exemple mis en place un parcours d’ateliers d’artistes résidents dans la commune – comme chaque année, début octobre – et créé pour l’annoncer deux ateliers de land art, l’un pour créer des œuvres collectives et l’autre, adressé aux enfants, pour qu’ils repartent dans leur famille avec une petite œuvre.
A noter aussi, dans ce même esprit d’ouverture aux partenariats locaux, la création de “ponts” certaines années dans le cadre du festival de jazz « Au Sud du Nord » (dont nous sommes partenaires depuis de nombreuses années) avec Le Pélican, Pub Concert larziacois, connu bien au-delà de la commune, avec une programmation musicale de type blues rock. C’est aussi notre partenaire artistique privilégié pour la Fête de la musique. Autre exemple de partenariat local : nous avons programmé, dans le cadre des Journées du patrimoine 2020, un concert de musique baroque avec deux professeurs du conservatoire de Lardy.
Quels sont les principaux atouts de votre commune, ses faiblesses, ses attentes… ?
Tout d’abord, la commune dispose d’un service culturel, avec deux professionnelles de la culture. Sinon, le premier atout, c’est le cadre de vie, avec un très beau grand parc municipal dans lequel ont lieu de nombreuses initiatives culturelles, ainsi que le Parc Boussard classé “Jardin remarquable” et récemment sélectionné pour le Loto du patrimoine au titre des monuments de l’Essonne.
Il y a bien sûr nos équipements culturels, mais aussi plusieurs commerçants labellisés “Papilles d’Or” [un label qui distingue chaque année les meilleurs commerçants et artisans alimentaires de l’Essonne] et qui attirent jusqu’à des Parisiens – un boulanger et un boucher.
Quant aux faiblesses, elles sont essentiellement liées à la coupure entre les deux quartiers de la ville, avec de surcroît une présence artistique et culturelle inégale de l’un à l’autre. Par exemple, le parcours d’ateliers d’artistes est beaucoup plus développé côté centre historique.
Pour ce qui est des attentes, je noterais celle d’une certaine forme d’ouverture, d’envie de partage aussi – en particulier en ce moment de crise sanitaire –, ce qui peut nourrir notre volonté de s’orienter vers plus de participation.
Quelle articulation avec l’intercommunalité ?
J’ai été conseillère communautaire dans le mandat précédent. Aujourd’hui nous représentons toutes deux Lardy, avec aussi deux autres collègues, dans la commission culture de la communauté de communes. Sur ce sujet, il faut considérer l’histoire : c’est un très jeune EPCI, formé au début du mandat précédent et qui, au départ, n’a pas pris la compétence culturelle mais gérait déjà la bibliothèque et le conservatoire. La nouvelle intercommunalité a repris à notre demande la gestion de ces équipements. Mais même si la communauté de communes a alors pris la compétence culturelle, elle ne s’engage pas encore sur une véritable action culturelle – plutôt vers une politique d’animation, avec des fêtes… Cela évolue, doucement mais sûrement. Notre commune a ici un rôle moteur. Par exemple, l’EPCI cofinance avec nous un projet d’intervention de Dumistes, embauchés sous forme contractuelle, dans les écoles.
Vos relations avec les autres échelons de collectivités d’Ile-de-France ?
Les relations sont très bonnes avec le département de l’Essonne, notamment au travers le financement partagé, chaque année, d’un certain nombre de projets culturels. Et ce depuis plus de dix ans.
Je noterais de la part des habitants une certaine forme d’ouverture, d’envie de partage aussi – en particulier en ce moment de crise sanitaire –, ce qui peut nourrir notre volonté de s’orienter vers plus de participation.
Ces partenariats concernent-ils votre action en direction des scolaires ?
En effet. Sur ce plan, nous avons construit avec des opérateurs ou des compagnies d’artistes des partenariats pour des résidences artistiques et culturelles en milieu scolaire, au rythme de trois par année, à quoi il faut ajouter l’accueil de Dumistes. De surcroît, nous finançons chaque année deux spectacles par niveau scolaire – trois avec celui de Noël. Donc un par trimestre, en veillant toujours à varier les styles pour sensibiliser les enfants aux différentes formes des expressions artistiques. Avec le temps, on se rend compte que la pertinence des interventions des enfants s’accroît, avec des questions de plus en plus fines. Et ce, grâce à une équipe enseignante très partante pour les projets qu’on porte.
Vos liens avec l’Etat déconcentré ?
Honnêtement, il y en a bien peu au niveau de la culture. Peut-être davantage pour le patrimoine, par exemple pour le Parc Boussard qui va être restauré en partenariat avec la DRAC, mais aussi pour l’EAC avec cette année une résidence d’artiste en milieu scolaire dans le cadre du projet de marionnettes, danse et musique « Aux origines de la mer ».
Cette rentrée est placée sous le signe inquiétant de l’épidémie de Covid-19…
La fin d’année a été très difficile. Tout a dû être annulé. Nous avons malgré tout continué à construire la saison, avec notamment des résidences d’artistes en milieu scolaire. Et tenté de reporter l’ensemble des spectacles annulés, d’où cette année une saison assez chargée. Bien sûr, puisque nous sommes en zone rouge, nous avons adapté l’accueil aux exigences sanitaires. Donc nous espérons pouvoir continuer ainsi notre saison, avec notamment une billetterie dématérialisée.
Vous venez d’adhérer à la FNCC. Pourquoi ? Qu’en attendez-vous ?
Cette adhésion vise à rompre l’isolement que peut entraîner l’épidémie et aussi à nous aider à mieux appréhender les évolutions nécessaires en matière de politique culturelle – en particulier celles liées aux notions de droits culturels et de participation – afin de ne pas simplement réitérer à l’identique l’action que nous avons menée pendant le précédent mandat. Donc adhérer à la FNCC pour ouvrir l’horizon.
Propos recueillis par Vincent Rouillon