Avec le dispositif 2S2C, il s’agissait, en grande urgence (de mi-mai et jusqu’à début juillet, date de début des vacances scolaires), de proposer aux enfants des activités sportives, culturelles, autour de la santé et du civisme pendant le temps scolaire. En effet, la crise sanitaire interdisait alors encore l’accueil des classes au complet. Premier bilan.
Deux députés, François Cormier-Bouligeon (LREM, Cher) et Béatrice Descamps (UDI et Indépendants, Nord), ont réalisé ce qu’ils qualifient eux-mêmes de « mission flash sur un dispositif flash » qui les a conduits à de nombreuses auditions, dont celle d’Annie Denis, membre du Bureau de la FNCC. Avec ce premier constat : un maigre bilan pour une belle idée. Et cette perspective pour pérenniser le dispositif dans les années à venir : instaurer une concertation entre les élus, les enseignants et les acteurs culturels et sportifs pour faire mieux se rejoindre les temps scolaires et périscolaires.
Les chiffres. Au 4 juillet, 2 940 communes avaient proposé un dispositif 2S2C dans 5 846 écoles à 167 051 élèves du premier degré. Dans le second degré, 66 conventions ont concerné 7 685 élèves. Au total, environ 8% des communes l’ont mis en place et 2,5% des élèves du premier degré y ont effectivement participé.
Pourquoi des résultats si modestes ? Malgré la bonne volonté d’un grand nombre d’élus et de directeurs d’écoles, les freins – liés à la fois à un manque de ressources et de concertation, à une urgence difficilement gérable et à des malentendus – ont été nombreux :
- certains maires ont ressenti le dispositif comme un défaussement de l’Etat sur les collectivités,
- malgré les assurances du ministre de l’Education nationale, la question de la responsabilité juridique des maires a multiplié leurs inquiétudes,
- les moyens financiers alloués par l’Etat (110€ par jour pour un groupe de 15 élèves) ont été le plus souvent insuffisants,
- le corps enseignant a parfois mal réagi, faute de concertation suffisante et par crainte d’activités de faible qualité, « notamment sur l’enseignement des activités physiques et culturelles auxquelles ils sont très attachés, car elles font partie intégrante du projet pédagogique »,
- les communes rurales ont manqué d’équipements, notamment sportifs, mais aussi de moyens humains,
- l’intrusion des communes dans le temps scolaire « a pu être interprétée, à tort, comme une volonté de substituer l’action des collectivités à celle de l’Education nationale »…
Pour autant, un certain nombre d’actions remarquables ont pu être initiées. Ou plutôt réexploitées. Car quand le dispositif a réellement fonctionné, ce sont essentiellement des initiatives périscolaires préexistantes qui ont été basculées pour une période limité sur le temps scolaire : les “projets éducatifs de territoire (PEDT), les Temps d’activité périscolaires (TAP) ou encore les dispositifs d’EAC (par exemple les Contrat locaux d’éducation artistique…). Autrement dit : ceux qui savaient déjà faire ont fait. Et bien.
Un idéal accessible. Pour les députés, ces constats n’enlèvent rien à la pertinence de l’idée qui a présidé à l’élaboration du dispositif. Un seule exemple en montre suffisamment à leurs yeux le caractère vertueux : dans la commune de Saint-Just, dans le Cher, le dispositif a fait grimper le taux de scolarisation en période de déconfinement de 50% à 85%. De manière plus générale, ils affirment leur conviction « que l’épanouissement des enfants passe par une plus grande place laissée au sport, à la culture et à l’engagement associatif dans l’organisation de leur temps de vie, qui ne se réduit pas au seul temps scolaire. Cet idéal, qui animait le dispositif 2S2C, n’est pas hors de portée. »
Pour cela, plusieurs conditions doivent être respectées, dont notamment déploiement en dehors du temps scolaire : « Le 2S2C ne peut pas, en période normale, empiéter sur le temps scolaire. C’est une condition capitale, à notre sens, pour que le dispositif soit accepté de tous. »
Puis les députés identifient quatre vecteurs de concertation nécessaires :
- la participation d’un plus large panel d’acteurs institutionnels (dont les DRAC, absentes cet été), associatifs ou culturels,
- une coordination à l’échelle du territoire,
- l’association, au plus près du terrain, du corps enseignant,
- temps de préparation et de concertation.
Relier les temps et les “mondes”. Ces quatre préconisations conduisent les députés à développer une vision prospective des politiques territoriales dont l’originalité consisterait à organiser sur la durée une concertation entre les domaines du sport et de la culture pour une meilleure articulation entre les temps scolaires et périscolaires, au bénéfice de la scolarité, de l’épanouissement des jeunes et de la citoyenneté.
A leurs yeux, pour tirer tout le parti possible d’un dispositif dont l’ambiguïté constitue la qualité première – un dispositif à la fois sportif et culturel « que l’on pourrait dire à cheval sur l’école et le monde extérieur », il importe de « repenser un temps périscolaire dans lequel les collectivités seraient responsables d’activités diverses proposées aux enfants, mais en lien plus étroit avec l’école : une forme de temps périscolaire qui ferait collaborer autour d’un projet local le corps enseignant, les collectivités et le monde culturel, associatif et sportif. »
Une question dès lors se pose. Quelle structure pourrait le plus efficacement réunir à l’échelle territoriale des représentants des ministères de la Culture, des Sports et de l’Education nationale, les collectivités dans leur diversité (communes et groupements, départements, régions) et les acteurs des champs sportifs et culturels ? La mission flash ne se prononce pas. Mais peut-être peut-on faire l’hypothèse que des réunions des Conseils des territoires pour la culture en région, élargis au sport et ouverts au dialogue avec les professionnels et le monde associatif, pourraient être l’espace de dialogue pertinent pour que « cet idéal », préfiguré par le dispositif 2S2C, ne reste pas « hors de portée ».
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Mission “flash” sur la mise en place du dispositif “2S2C” à l’école (15 juillet 2020)