Ville principale de la Communauté de communes du Pays des Paillons, dans les Alpes-Maritimes, Contes s‘est développée à partir de la fin du 19e siècle grâce à une vie industrielle dynamique, source d’une richesse culturelle mêlant des traditions à la fois ouvriéristes et paysannes. Dotée de nombreux équipements et d’une intense vie associative, la commune (7 500 habitants) a fait le choix de promouvoir auprès de toutes et tous l’accès à la culture avec une priorité accordée à la jeunesse, via une politique de gratuité, mais aussi une volonté de nouer enjeux culturels et environnementaux. Entretien avec Armand Gasiglia, maire-adjoint à la culture, au patrimoine et à l’état civil.
La nouvelle équipe municipale de Contes s’inscrit-elle dans la continuité ? Le mandat à la culture est-il un choix de votre part ?
La nouvelle équipe, d’union de gauche, est en continuité avec la précédente. Elle est même sortie renforcée des dernières élections. En ce qui me concerne, en tant que maire-adjoint à la culture, au patrimoine et aussi à l’état civil, c’est un mandat qui s’inscrit dans le prolongement du précédent, mais avec un changement d’envergure puisque j’étais auparavant conseiller municipal délégué en charge plus précisément du Musée et des événements en relation avec le patrimoine. A cela s’ajoute aujourd’hui la médiathèque et la culture en général.
Comment décririez-vous la particularité de votre territoire ?
La commune compte 7 500 habitants et la communauté de communes, dans laquelle Contes est la ville principale (26 600 habitants répartis dans 13 communes). Proche de la côte et de la montagne – un territoire qu’on qualifie de “moyen pays” –, la commune a la particularité d’avoir vécu en vase clos jusqu’au rattachement à la France en 1860. Le désenclavement et la montée en puissance de Contes sont venus après, avec les activités industrielles qui s’y sont installées, notamment la cimenterie Lafarge. Ce dynamisme économique a drainé des populations étrangères, notamment italiennes, et entraîné une nouvelle vie culturelle, avec notamment une fanfare créée par la société Lafarge. Aux traditions et fêtes patronales est donc venue s’ajouter une tradition de culture ouvriériste qui a donné un élan aux municipalités qui se sont succédées.
La fanfare existe-t-elle toujours ?
Non, elle a disparu dans les années 60. Mais dans le cadre communautaire nous disposons d’une Maison de la musique et de la danse implantée sur la commune, avec 800 adhérents à l’année. Elle ne désemplit pas et une extension est même envisagée.
Quelles sont les principales lignes de force de votre projet culturel ?
Une priorité claire est donnée à la jeunesse. Sur Contes, nous disposons de cinq écoles communales qui accueillent 750 élèves, d’un collège, avec 800 collégiens et sur la communauté de communes d’un lycée qui tourne à plein régime, avec 900 lycéens. Nous essayons donc d’accompagner ce potentiel de jeunesse.
D’un point de vue démographique nous prônons un développement mesuré – et c’est là le fruit d’une volonté politique de maîtrise l’urbanisation, afin de ne pas devenir une cité-dortoir de Nice –, la population se répartit, avec une réelle mixité sociale, au tiers entre la jeunesse, les actifs et les retraités.
Plus globalement, notre principe d’action est de faciliter l’accès à la culture au plus grand nombre en privilégiant chaque fois que c’est possible la gratuité, pour éviter tout frein d’accès. Nous essayons par ailleurs de proposer une offre de qualité aussi diversifiée que possible.
Quels sont les principaux atouts culturels de votre commune ?
Tout d’abord un éventail conséquent, et qu’on nous envie, d’équipements de proximité qui présentent tous l’avantage d’être réunis sur un périmètre très réduit : une Maison pour tous qui sert notamment à des projections hebdomadaires de films, une médiathèque animée par trois agents permanents. Elle a dernièrement fêté ses vingt ans et bénéficie d’une très bonne fréquentation, recevant près de 3 000 élèves chaque année. Autre équipement important, le Musée des arts et traditions populaires. Il a été fondé à l’initiative d’une figure politique et culturelle locale, ami de nombreux artistes dont Picasso, Georges Delserre-Tabaraud. Inauguré en 2012, il a vite trouvé un public pour atteindre une fréquentation annuelle moyenne de 5 000 visiteurs. Outre ses collections permanentes, le Musée propose environ tous les trois mois des expositions aux thématiques variées croisant les traditions historiques de la commune avec la présentation d’artistes locaux.
Y a-t-il un travail mémoriel sur la tradition culturelle d’origine ouvrière ?
Oui. Ainsi, le Musée s’organise en salles par thèmes autour de l’ensemble des éléments qui ont contribué à forger le passé de la commune : une entrée montrant les familles qui se sont implantées sur la commune depuis quatre ou cinq générations, puis une salle sur la complexité de la gestion de l’eau – ici une denrée précieuse et rare qu’il faut savoir capter et canaliser –, une autre présente les activités qui ont fait la richesse du village, de l’oléiculture à la briqueterie et la poterie, ou encore aux activités de la vigne, aujourd’hui disparues… D’autre salles s’enchaînent, créant un parcours de découverte où nous avons délibérément voulu tout autant montrer que susciter la curiosité.
De ce même point de vue mémoriel, et en lien avec les associations patriotiques, nous avons par exemple remonté les généalogies des 73 noms inscrits sur le monument aux morts, en retrouvant les circonstances de leur disparition lors de la guerre de 14-18. Cela a été expliqué aux enfants, avec l’appui de supports photos, de témoignages écrits. Nous avons également pu évoquer l’existence d’un officier de la Guerre de 14 dont la famille est toujours implantée ici. Pour moi qui ai participé à ces animations, j’ai pris plaisir à répondre aux innombrables questions des enfants sur la guerre et le Contes d’autrefois.
Un lien entre culture et environnement ?
Nous travaillons pour ce mandat sur la création d’une Maison de la biodiversité et du développement durable. Le comité de pilotage de ce projet réunit à la fois des scientifiques, des enseignants et des médiateurs culturels. Cet équipement fera partie du Pôle culturel de Contes, créé tout dernièrement, qui regroupe déjà la Médiathèque de Contes et le Musée. Le Pôle bénéficie des services d’une directrice dont la mission est de faire le lien entre ces trois établissements.
D’autres équipements de proximité complètent l’offre culturelle : la Maison pour tous, qui accueille notamment des animations intergénérationnelles (Fête des châtaignes, Carnaval…), l’Office de la jeunesse et de la culture dont le rôle, en lien étroit avec la Médiathèque et le Musée, est très important, notamment pour les temps périscolaires et les vacances scolaires.
Nous avons également deux théâtres. Le premier est une salle communautaire de 500 places – le Théâtre de l’Hélice – avec une programmation, gérée par l’association contoise “Polysonance”, de très haute qualité et dont le prix des billets est calculé au plus juste.
Nous disposons également d’un théâtre de verdure d’une capacité de 2 500 personnes. C’est là que se déroule notamment le festival “Païoun Ven” – aujourd’hui devenu un événement incontournable de la vie culturelle et qui rayonne bien au-delà des limites de la commune. Il est réservé à des manifestations plus spectaculaires pendant la période estivale, avec une fréquentation pouvant aller jusqu’à 25 000 spectateurs par an. A noter que parmi les spectacles diffusés, certains sont offerts par le Département dans le cadre des “Estivales”.
Quelle est la place de la vie associative ?
A ces équipements il faut en effet ajouter un important tissu associatif, avec 80 structures actives – un Contois sur deux est adhérent à une association – dont 17 dans le domaine culturel ou patrimonial. Avec des activités variées : chants et danses traditionnels, ateliers de gravure, de théâtre et de cinéma, langue occitane… D’autres s’intéressent au patrimoine, que ce soit à certaines chapelles ou encore à l’orgue Valoncini de l’église Sainte-Marie-Madeleine : un petit bijou italien de la fin du 19e siècle que nous avons fait restaurer et qui donne l’occasion, chaque année en mai, d’un festival de concerts durant lequel des organistes de renom viennent se confronter à cet instrument original par ses sons de fifres, de grosse caisse, de cymbales… Il existe aussi une association de lectures à voix haute, “Les mots à la bouche”, au rayonnement départemental. Ou encore des associations d’art et de peinture… Il faut noter bien sûr l’implication remarquable de bénévoles qui œuvrent dans ces associations.
A noter aussi, en périphérie du Musée, le Site des moulins, où l’on peut visiter un moulin à huile dont les mécanismes du 17e siècle sont classés et une forge à martinet dont tous les mécanismes sont actionnés par la force de l’eau. De ce même point de vue patrimonial, citons également notre église et ses deux autels remarquables dont un est répertorié au circuit des “Bréa”.
La municipalité soutient et accompagne l’ensemble de ces associations financièrement et matériellement.
Les rapports de Contes avec l’intercommunalité ?
Avec l’intercommunalité, dont le maire de la commune a été longtemps président, et actuellement 1er vice-président, les liens sont bons.
Pour autant, et de manière plus générale, le niveau de concertation reste perfectible. La discussion existe, mais sans que ce soit formalisé. J’avais par exemple évoqué qu’on réfléchisse à une organisation à l’échelle de l’EPCI, à la création d’un circuit à l’occasion des Journées du patrimoine, avec des horaires concertés afin que les gens puissent participer à plusieurs animations différentes. Ce n’est pas gagné, en particulier parce que le contexte géographique montagneux ne facilite pas les choses : certains villages sont assez éloignés les uns des autres.
N’y a-t-il pas un réseau des bibliothèques, des catalogues partagés…
Pour l’instant non. La médiathèque la plus proche de nous et la plus conséquente en activités se situe à La Trinité, à seulement 8km, mais elle est située sur la Métropole niçoise alors que nous sommes intégrés dans une communauté de communes. Il n’y a aucun problème à travailler ou discuter ensemble. Pour autant, la Métropole niçoise dispose de bien plus de moyens que nous, des infrastructures culturelles conséquentes, et un éventail d’offres très large. Nos rapports s’inscrivent donc en termes de complémentarité et non de concurrence. Il existe d’ailleurs de nombreux liens entre les associations contoises et d’autres associations au niveau départemental et régional avec des échanges, des rencontres, des visites.
Pourquoi adhérer à la FNCC ?
C’est un conseil de Chantal Carrie, élue de La Trinité, également récemment adhérente. Je pense que la FNCC peut nous apporter des échanges d’expérience, enrichissants – et plus généralement du conseil, de l’aide, des liens et des contacts nous permettant d’éviter certains pièges ou, à l’inverse, de nous inspirer d’initiatives qui ont bien fonctionné ailleurs. Découvrir et prendre des enseignements pour que la culture soit toujours un élément incontournable de la vie…
Propos recueillis par Vincent Rouillon