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Éditorial du président de la FNCC dans la Lettre d’Échanges Culture et ruralité

Par 25 novembre 2024Aucun commentaire

Avec la « fin des terroirs » analysée avec brio par Eugen Weber dès 1976, on a peut-être cru un peu rapidement que c’était aussi la fin des campagnes. C’était sans compter sur des réalités immuables ou du moins ancestrales, le paysage, le climat, le relief, une rivière, une côte et partant de là une manière de vivre son pays, entendu dans l’acception gauloise, celle du pagus.

L’espace rural du géographe a laissé la place aux territoires ruraux des élus locaux et des aménageurs. Et la culture dans tout cela ? Mais elle est première, consubstantielle à la naissance de nos bourgs et villages. Ce sont d’abord des langues locales, des « racontottes » dit-on chez moi en Franche-Comté, transmises au coin du feu, ce sont ces jeux de cartes provinciaux, des troupes de saltimbanques ou de théâtre qui parcouraient les villages jusqu’avant la guerre de 14. Ce sont les fêtes votives venues du fond des âges, ce sont ces danses populaires que l’on pratique en groupe à l’opposé des danses de salon que l’on pratique en couple…

La culture a toujours irrigué les bourgs et les villages. Après-Guerre on l’a moqué en la traitant de folklorique, dans les années 60 et 70 on a cherché à la réanimer voire à la réinterpréter avec les foyers ruraux et plus récemment elle aurait pu être un objet des études sur la démocratie culturelle et les droits culturels mais elle est passée souvent sous le radar.

Aujourd’hui la campagne est vécue comme un paysage, une manière de vivre et plus comme un espace de production. Celles et ceux qui y résident, natifs ou nouveaux venus, ont des attentes en matière culturelle qui ne sont pas éloignées de celles des urbains.

L’État et les collectivités dans le cadre de l’aménagement du territoire culturel ont multiplié les équipements tels le formidable réseau des médiathèques ou celui des écoles de musique. Les scènes labellisées ont été mandatées pour sortir de leurs murs. Mais l’aménagement du territoire ce n’est ni plus ni moins que la création de pôles qui nécessitent des déplacements le plus souvent avec un véhicule individuel. C’est alors que s’impose ou se réimpose à nous la question de l’itinérance artistique à travers la campagne. Il faut renverser le paradigme, aller au plus près des populations. Il faut infuser chaque village et non plus se réjouir que chaque petite commune serait à moins de 5 km d’une bibliothèque. On a tendrement moqué les bibliobus… ils ont souvent disparu (pas toujours cependant) avec l’arrivée de l’auto… et si la remise en cause de la voiture individuelle, de son coût budgétaire comme environnemental sonnait l’avènement d’un nouvel âge d’or des ruralités où la culture et les artistes seraient un peu les jardiniers de la société ?

Jean-Philippe Lefèvre, président de la FNCC

 

Lire la Lettre d’Échanges « Culture et ruralité » (novembre 2024)