Meyreuil (5 800 habitants), dans le Pays d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), est une commune au passé minier réunissant plusieurs hameaux. Ville démographiquement dynamique, grâce à l’arrivée de nouveaux couples avec des enfants jeunes, c’est aussi une ville culturellement animée. Barbara Ferreira, conseillère aux événements culturels et à l’école de musique et d’arts plastiques, pilote une intense activité de programmation mais aussi d’éveil et d’enseignement artistiques, avec l’appui du tissu associatif. Elle veille également, par le choix de la gratuité et la diversité de l’offre d’animation et de spectacles, à intéresser chacune et chacun.
Y a-t-il eu un changement de majorité aux dernières élections ?
La nouvelle équipe municipale menée par notre maire, Jean-Pascal Gournès, s’inscrit dans la continuité de la précédente mandature. Pour ma part, on m’a confiée la délégation aux événements culturels et à Muz’Art, l’école municipale d’arts plastiques et de musique de Meyreuil. Je suis élue depuis 2008. J’étais présidente et vice-présidente de l’Office municipal socioculturel pendant douze ans avant de prendre la fonction de conseillère lors des dernières élections.
La particularité de votre territoire ?
La commune, à l’origine constituée de hameaux, se compose de plusieurs quartiers distants les uns des autres, avec cependant un centre administratif – “le vieux Meyreuil” – et, à 2 ou 3 kilomètres, le centre de vie de la commune, là où se situent les commerces et les écoles. Elle est en pleine expansion. La construction d’un nouveau quartier a permis l’arrivée de nouveaux foyers avec de jeunes enfants. Donc une ville très agréable à vivre – ni trop rurale ni trop urbaine et où de nombreuses entreprises sont implantées –, avec une grande mixité de population qui nous oblige à une programmation très variée pour que chacun puisse trouver ce qui l’intéresse.
Quelle est la fonction d’une politique culturelle au sein d’un projet politique ?
On aborde la culture sous plusieurs angles. Je travaille en étroite collaboration avec l’Office municipal socioculturel autour d’ateliers destinés à éveiller les plus petits à la culture via par exemple des concerts pédagogiques dans le cadre du Festival de blues, en septembre, ainsi que des spectacles pour les tout-petits, les enfants en crèche et à la maternelle. Cette fonction d’éveil d’une politique culturelle, qui passe aussi par des ateliers dans notre médiathèque, me semble fondamentale.
Autre axe : l’enseignement dispensé par l’école de musique et d’art que nous voulons faire agréer. Avec dix professeurs de musique, deux d’arts plastiques pour des cours qui vont de l’éveil musical (à partir de quatre ans) jusqu’à l’âge adulte, et 220 élèves, elle donne de très bons résultats.
Troisième point : rassembler notamment via des événements familiaux pérennisés depuis plus de dix ans qui se déroulent sur le domaine communal de Valbrillant et sont un moment de partage entre plus jeunes et plus âgés. A cela s’ajoute une dense programmation – concerts, pièces de théâtre, animations…
Dernier axe, le soutien aux associations dont une quarantaine sont culturelles, avec le label “Meyreuil, terre d’espoir”. Parmi nos associations culturelles, il y a en particulier Théâtre Off Meyreuil qui organise chaque année les Journées des arts vivants, sur une semaine, en lien avec des troupes venant d’autres communes ainsi que des spectacles tout au long de l’année. Et aussi l’association chorale Chant libre qui propose des concerts de qualité sous la direction de son chef de chœur professionnel. Enfin, l’événement majeur de la commune, mis en place depuis 2019, est le Blues Roots Festival, entièrement porté par la commune et que nous avons pu maintenir en 2020 et 2021, avec des ateliers d’initiation au blues pour les élèves du primaire, une jam session où l’on reçoit des musiciens de renom et trois concerts, là encore avec des grands noms du blues.
Mobilisez-vous particulièrement l’espace public ?
Oui, d’autant plus que nous bénéficions d’un climat très propice, d’avril à octobre, et d’un très beau domaine communal. Nous organisons de nombreux événements en extérieur, tout au long de l’année : deux fêtes pour les saints de la commune – la Saint Marc et la Saint Antoine –, une fête votive avec des illuminations, une autre que nous appelons “Les Agapes”, “Noël en fête” pour les tout-petits et la Journée de Pâques, avec une chasse aux œufs. A noter aussi, cette fois en intérieur, le “souper calendal”, avec des troupes traditionnelles provençales de chant et de danse.
Toujours sur l’espace public, et malgré la crise, de nouveaux projets ont été menés à bien, dont la mise en place, en juillet 2021, de séances de cinéma en plein air sur quatre soirs, avec l’objectif de toucher tout le monde grâce à une programmation différente chaque jour. Enfin nous avons fait le choix de faire réaliser une fresque sur le bâtiment de l’école Muz’Art avec la participation des élèves dans le cadre d’un atelier pendant une semaine de vacances scolaires.
Quelles sont les principales lignes de votre projet ?
La gratuité des spectacles, dont la programmation est construite par l’Office culturel et la municipalité. Nous comptons aussi aménager un espace, à la fois salle de projection et café-théâtre, pour que puisse notamment s’y produire la troupe de Théâtre Off Meyreuil. Cela étant, nous avons déjà des lieux pour la diffusion, à l’école d’art et dans une jolie salle polyvalente aménageable. Un autre bâtiment dispose d’une salle plus intimiste où peuvent se tenir des expositions. Et aussi la médiathèque, qui accueille de très nombreuses manifestations : expositions, concerts, lectures… Une Maison des associations culturelles et sociales est également en cours de construction dans le nouveau quartier de la ville.
Comment articuler culture et environnement ?
La commune n’utilise plus de plastique depuis déjà trois ans. Cela fait aussi partie du cahier des charges du Festival de blues. Nous avons également noué un partenariat avec une société pour recycler les mégots et distribuer des cendriers de poche. Les questions environnementales, sur lesquelles l’une des ajointes de la mairie est très impliquée et avec laquelle je travaille étroitement, sont également présentes dans les thématiques abordées lors des conférences données à la médiathèque.
Avez-vous un service culturel à la mairie ?
Je m’appuie sur une collaboratrice. Avec la présidente de l’Office municipal socioculturel, elle est en charge de la programmation et de l’organisation de tous les événements.
Des difficultés particulières ?
Le frein principal tient à la répartition géographique. Il est essentiel de pouvoir réunir tous les habitants autour d’une programmation commune, ce que ne facilite pas son morcellement. Autre difficulté, de grands écarts générationnels entre une partie vieillissante de la population et une autre très jeune, ce dont la programmation doit tenir compte sachant que les attentes diffèrent.
Le lien avec la Métropole Aix-Marseille-Provence ?
Depuis deux ans, on constate une baisse significative des soutiens de la Métropole, qui rend difficile de conserver nos acquis. Nous ne connaissons pas encore le budget alloué pour 2022… Comment alors construire une programmation, car ce budget permet de choisir les spectacles du catalogue des tournées intercommunautaires pour compléter notre offre propre ? Les petites communes ont de plus en plus de mal, surtout depuis 2020, à financer des événements alors que le soutien de la Métropole devrait servir à cela.
Côté Département, nous bénéficions de la programmation “Provence en scène”, avec un catalogue de spectacles très riche et très varié proposé uniquement par des acteurs du territoire, ce qui représente un soutien important aux intermittents. Nous travaillons aussi avec la bibliothèque départementale pour des animations.
Vos relations avec la Région, la DRAC ?
La DRAC devrait participer, on l’espère, au financement de la construction et de l’équipement de l’extension de la médiathèque que nous créons dans le nouveau quartier, en particulier pour le numérique, avec l’appui d’un conseiller et des financements de France Relance. Elle devrait aussi prendre partiellement en charge du personnel pour l’extension des horaires d’ouverture. Les rapports sont donc très bons avec la DRAC ainsi qu’avec la Région puisque sa régie culturelle nous permet de louer du matériel pour les expositions, concerts et animations.
Estimez-vous qu’il manque des espaces de concertation entre collectivités ?
Il y a en effet un effort de concertation à faire. Pour ma part je participe à la commission culture du Pays d’Aix, qui fait maintenant partie de la Métropole. Mais nous ne nous réunissons qu’une fois par mois. Et la crise sanitaire ne nous aide pas. Nous entretenons cependant des liens privilégiés avec certaines communes avec qui nous partageons le même passé, notamment minier : Gardanne et Gréasque.
Quel message pour l’élection présidentielle ?
La culture fait partie des parents pauvres des politiques nationales, avec la baisse de ses moyens depuis une quinzaine d’années. Il est dommage de voir fondre comme neige au soleil les aides dont nous bénéficiions auparavant. C’est d’autant plus compliqué pour nous que nous avons fait le choix d’une politique de gratuité pour permettre un accès plus large à la culture. Il faudrait que nous puissions être porteurs de projets et que nous soyons entendus… Peut-être est-ce un peu utopique, mais mon leitmotiv serait “la culture pour tous et partout”, c’est-à-dire pas seulement dans les grandes villes. Nous devrions avoir le possibilité d’avoir notre propre programmation pour pouvoir proposer dans la commune ce qu’on peut voir dans les grandes villes. Tout le monde n’a pas forcément les moyens de se déplacer.
Vous venez d’adhérer à la FNCC. Pourquoi ?
Les formations m’ont beaucoup intéressée – j’ai participé à celle sur les résidences d’artistes –, en particulier pour les échanges avec d’autres communes, ce qui permet de profiter de leur expérience. Pour nous qui avons un projet de résidence dans les années à venir, cette formation m’a été très utile. Il a donc été décidé de poursuivre l’adhésion, car l’expérience des autres communes ne peut que nous être très bénéfique. Plus globalement, je n’ai pas d’attente particulière de la FNCC mais je suis preneuse de toutes les informations que la Fédération nous fait parvenir.
Propos recueillis par Vincent Rouillon